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La violoniste Lisa Batiashvili fait un triomphe dans Tchaïkovski à la Philharmonie de Paris

La Philharmonie accueillait ce 11 septembre le concert de rentrée de l’Orchestre de Paris devant une salle comble. Depuis ses débuts en 2021, l’effet Klaus Mäkelä, qui entame sa quatrième saison de directeur musical auprès de la phalange symphonique parisienne, n’a cessé de croître et de se multiplier. La faveur du public est d’autant plus grande que le mandat du maestro se termine en 2027, année où le jeune trentenaire, nommé concomitamment à la tête de deux des plus prestigieuses formations mondiales, l’Orchestre royal du Concertgebouw d’Amsterdam et l’Orchestre symphonique de Chicago, prendra son envol international.
La soirée a débuté de manière assez inhabituelle avec le Laudate Dominum, du compositeur letton Peteris Vasks (né en 1946). Une œuvre concentrée, empreinte de douleur et de sérénité, qui met particulièrement en valeur les forces vocales du Chœur de l’Orchestre de Paris désormais cornaqué par le chef britannique Richard Wilberforce, en poste depuis 2023. Alternance de parties orchestrales, expressives et solennelles, et de longues et périlleuses plages a cappella : l’homogénéité des timbres et la justesse d’intonation flirtent avec la perfection. Un « alléluia » conclusif réunira enfin voix et instruments.
C’est cependant vers Lisa Batiashvili que se tendent les regards. D’autant que la violoniste géorgienne interprète l’un des tubes du répertoire, le Concerto pour violon, de Tchaïkovski. L’Orchestre de Paris a lancé les mesures d’introduction qui offrent à la musicienne la primeur du thème chantant du premier mouvement. La sonorité est claire et fruitée, la technique absolue, dont les coups d’archet subtils modèlent un discours musical inventif et sans cesse renouvelé.
Loin des violonistes qui chargent la barque tchaïkovskienne d’un romantisme poisseux, trop chargé en graisse et en sucre (Nutri-score G), Batiashvili instille dans la musique une grâce singulière, dont la force expressive et l’infinie délicatesse n’empêchent ni les prises d’archet au corps à corps ni les montées d’adrénaline dans le vertige des aigus. Soutenue par la direction souple mais corsée de Mäkelä, elle déploie un jeu feu-follet qui force l’admiration jusqu’à l’émerveillement d’une cadence – ce moment où l’orchestre se tait pour laisser place au soliste – d’une beauté à couper le souffle.
Après l’élégiaque rêverie d’une magnifique « Canzonetta » jouée sur le fil, où Batiashvili prend le risque de quelques légers portamentos à la manière tzigane, le finale survitaminé d’un rhapsodique « Allegro vivacissimo ». La musicienne y déploie une liberté de ton endiablée, le feu d’artifice d’un jeu à la fois ludique et nerveux, sauvage et lumineux, donnant définitivement tort au grand violoniste Leopold Auer (1845-1930), dédicataire démissionnaire de l’œuvre (finalement créée en 1878 par Adolph Brodsky), qu’il avait déclarée injouable.
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